Le sujet me titille depuis quelques temps. Il est toujours délicat à aborder car, comme souvent, il remue un paquet de merde que les joueurs, dans leur globalité, n’aiment pas trop voir remonter à la surface. Mais… Ce n’est pas en occultant un problème qu’il cesse d’exister.
La femme, ce curieux animal.
Oui, le sexisme est un problème sociétale, et pas uniquement un problème lié à nos loisirs. C’est une évidence et une fois cela dit, rien n’a été dis. Encore une fois, cela ne veut pas dire qu’il faut occulter le problème. Bien sur, ce n’est qu’une frange de celui-ci, mais bon… Il faut bien commencer quelque part.
Je passerais assez rapidement sur le problème dans le jeu vidéo. Le loisir est gangrené par un sexisme vomitif, qui s’avère extrêmement problématique. Je retraiterais le sujet plus en détail plus tard, en fait, car j’ai bien l’intention de l’accompagner d’une autre problématique qui me tient à cœur – et que l’on retrouve aussi en figurines, d’ailleurs.
Reste que le jeu vidéo, de par son extrême importance, est une vitrine assez tragique des dérives que peut entrainer un loisir estampillé « masculin » : comportements indignes, harcèlement, menaces… Accompagné d’une couche de déni assez épaisse pour faire monter de 15 mètres le niveau de la mer.
Les jeux de plateaux et de figurines ne sont, cependant, pas en reste.
Le jeu de plateau est peut être le moins touché. La proportion de joueuses est plus importante que dans les loisirs connexes et l’impression globale semble être que chacun y est à sa place. Impression qui se délite assez rapidement dès que l’on touche à du gros jeux bien complexe (« C’est pas un jeu de gonzesses ») ou, ce qui nous touche plus ici, que l’on approche de la limite entre plateau et figurines.
Car, oui, le jeu de figurine, c’est « un jeu de mecs ». Opinion crétine s’il en est mais partagée assez globalement de façon plus ou moins consciente. Cela se manifeste par des comportements qu’un observateur extérieur au milieu ne manquera pas de trouver curieux.
« Il y a peu de fille dans notre hobby ».
Le profil type du pousseur de plomb, c’est le jeune mâle blanc en pleine puberté ou le gros dégarni qui sent la pisse et la bière. Le regard porté sur le loisir de la figurine est toujours aussi sévère de la part de l’opinion public, entre infantilisation et dérive passagère. Et ce profil type entraine l’exception du profil féminin. Les femmes sont « rares » dans notre milieu et sont, dès lors, regardée… Comme des femmes… Et non comme des joueurs.
Un exemple ? Faite un tour sur les forum traitant de figurines. Un utilisateur qui se présente comme une femme se retrouve instantanément traitée différemment. Cela passe souvent par cette expression typique : « Ca fait plaisir de voir une fille faire de la figurine ! ».
Vous ne m’ôterez pas de l’idée que c’est une expression des plus curieuses. Parce que voyons… Qu’est-ce que cela change ? Cela lui octroi-t-il in-fine un avantage quelconque ? A priori… Non. Cela lui fait il aborder le loisir différemment ? Pas plus que n’importe qui, il me semble. Il y a des joueuses qui n’aime pas peindre et des peintres qui n’aime pas jouer, comme du coté masculin.
Alors pourquoi ? Un vieux relent de machisme protecteur, sans nul doute. Un gros rien de puberté encore au travail, probablement. La joueuse est une catégorie à part. Elle n’est pas considérée comme un joueur normal. « Bah non… C’est une femme ! » Vous m’excuserez du peu, mais c’est pas bien fin comme façon d’aborder les choses…
A cela s’ajoute des comportements très limites. Le plus soft reste d’adoucir son jeu face à une femme. On se croit fair-play en laissant passer plus d’erreurs. On s’imagine être un gars bien en ne jouant pas au maximum de ses capacités… Un comportement aberrant et, au final, très insultant pour la joueuse en face. Comme si elle était une espèce de sous-joueur mal dégrossis ayant besoin qu’on lui tienne la main. Il serait bon, parfois, de se mettre à la place de la personne en face et de réfléchir à la façon dont on recevrait un tel comportement.
La drague lourdingue, aussi. Un sujet qu’on voit revenir régulièrement. Bon… Tout lieu en vaut un autre pour faire une rencontre – sauf peut-être l’arrière cours de l’immeuble au milieu des poubelles. Mais franchement, une partie de figurines est-elle vraiment le lieu pour draguer de la demoiselle ? Outre le caractère insultant de l’action (on en revient au point évoqué juste au dessus), cela est propre à mettre très mal à l’aise la personne en face…
De plus, cela peut générer un autre comportement : celui du joueur vexé. Ah… le joueur vexé… Il a prit un râteau, il a perdu… Peu importe la raison. C’est la faute de son adversaire. Et comme celui-ci est une femme, c’est pire encore : il y a de la fierté masculine à défendre !
Et diantre, que le florilège d'excuses et d'insultes est peu varié !
« T’as vu son décolleté ? Comment tu veux que je me concentre ? »
« Mouais, c’est pas une joueuse, juste une salope qui veut tâter du mec ! »
« J’ai été bien gentils, vu sa façon de jouer, je la retournais trois fois ! »
« Elle m'aguiche pour gagner et après, elle fait sa fière ! Aucune honte ! »
« Bien sur que j’ai fait exprès de perdre ! Je ne voulais pas la faire chialer ! »
Je vous en passe et des meilleurs.
(Et, oui, tout ce qui est cité plus haut à été entendu autour d’une table de jeu…)
Au final, tout ça pour dire quoi ?
Que je suis de plus en plus atterré par le comportement de certains joueurs qui s’imagine qu’une joueuse est plus que cela… Ou moins. Non, une femme n’a pas à être traitée différemment parce qu’elle est une femme.
Bien sur que si elle débute, il faut y aller en douceur. Comme pour un mec, en fait. Mais une joueuse aguerrie n’a pas à être traitée avec condescendance. Mettre la cause d’une défaite – ou d’une victoire – sur le sexe de l’adversaire est un comportement proprement imbécile.
Personnellement, je joue à fond dans tous les cas. Je n’irais certainement pas me restreindre dans ma stratégie parce que j’ai une femme en face. Traiter les gens de la même façon est une question de bon sens et de respect élémentaire, ni plus, ni moins. Un bon sens malheureusement loin d’être toujours présent et qui explique aussi pourquoi le sexe féminin est aussi discret dans notre loisir de figurinistes : cela vous donnerais envie, à vous, de jouer si l’on vous regardait à chaque fois comme une bête curieuse ?
Et puis quoi, vous avez peur qu'elle s'amuse ?
Je suis vraiment TRES heureux de lire ce genre d'article. Le sujet me tient particulièrement à coeur et depuis quelques temps j'ai pas mal lu sur le sujet. J'avais vaguement dans l'idée d'en faire un billet sur mon blog mais en te lisant je me suis décidé à le faire ! Ceci dit je traiterai plus de sexisme dans les jeux que chez les joueurs.
RépondreSupprimerJ'ai en effet aucun d'exemples de mauvais comportement chez les joueurs vis à vis des joueuses. Sans doute parce que je ne rencontre quasiment aucune joueuse et j'ai donc peu d'occasion de voir comment les joueurs se comportent face à une joueuse.
Le truc qui s'en rapproche le plus c'est les commentaires sur les forum où la copine/femme du joueur est volontiers décrite comme la chieuse qui fera qu'on pourra pas venir assister à tel tournoi ou convention.
En tout cas un grand merci pour ce billet.
Le sexisme dans les jeux est prévus - je suis le premier à trouver que, notamment, les bimbos à gros lolos, ça va cinq minutes. Mais je pense traiter avant le cas précis du jeu vidéo (un milieu horrible si l'on est une femme) et dans la foulée, parce que les deux sont pas mal liés, du casual gaming.
RépondreSupprimer(Un sujet qui me tiens pas mal à coeur.)
Peut être que l’environnement dans lequel je vie à influencé ma façon de voir - sans doute même - mais j'ai toujours fréquentés des joueuses dans le jeu. A l'époque de Confrontation, j'avais deux amies qui me mettaient des branlées monumentales (avec des armées magnifiques, histoire de bien enfoncer le clou) et je ne parviens toujours pas à comprendre comment certains joueurs pouvaient se permettre de les regarder de haut.
Ma femme est une joueuse régulière de jeu vidéo, et ça surprend toujours. Idem, je ne comprend pas ce qu'il y a d'exceptionnel à fraguer du zombies quand on a une paire de seins. C'est quand même elle qui m'a fait (re)découvrir Fallout.
En tout cas, c'est pas elle qui me fera chier quand je veux faire du tournois, c'est sur. :)